Le huitième continent

Les deux grands traits que vous voyez, coincés dans la roche de la baie de Curio, en Nouvelle-Zélande, sont des arbres. Fossilisés. Ils sont là depuis 180 millions d’années, avec toute une forêt détruite par des coulées de boues volcaniques. A l’époque, ils appartenaient à un continent énorme de 4,9 millions de kilomètres carrés (3 500 km de long sur 1 300 de large) à l’est de l’Australie : Zealandia. Ce qu’il en reste ? La Nouvelle-Calédonie et la Nouvelle-Zélande. La plus grande partie s’est affaissée sur le plancher océanique après s’être séparée dans un grand fracas géologique d’abord de l’actuel Antarctique occidental, il y a environ 85 à 130 millions d’années, puis de l’Australie (60 à 85 millions d’années). Si on peut aujourd’hui raconter ce moment de la construction de la géographie de notre planète, c’est que des chercheurs néo-zélandais ont pu reconstituer l’histoire en examinant… des cailloux. Des morceaux de roches. Des grès du Crétacé comme des pierres de l’Eocène. Et nous voici désormais face à un huitième continent. Le fait que l’essentiel de son territoire se trouve par 1 000 ou 2 000 mètres sous la surface de l’océan n’enlève rien à sa grandeur. Comme aucun humain n’a pu connaître Zealandia alors qu’il émergeait (les premiers hominidés sont apparus il y a 6 à 8 millions d’années), il ne nous reste plus que des bateaux pour couvrir les 93% de ce continent que personne n’a jamais vu en entier. Mais que l’examen d’une carte des fonds marins permet de reconstruire. Alors apparaissent des plateaux, des chaînes de montagnes, des plaines, de larges baies… Un monde que nous ne pouvons désormais qu’imaginer. Pour mieux rêver à un monde plus grand, et meilleur.

Christophe Agnus

Photo Pavel Špindler – Carte NASA

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