Cette photo a été prise il y a exactement 79 ans, en fin d’après-midi, alors que le croiseur de bataille Scharnhorst est en train de sombrer, au large du Cap Nord (Norvège). Ce navire de 235 mètres de long était l’un des fleurons de la Kriegsmarine, et il a été coulé par les tirs et torpilles de trois croiseurs et deux cuirassés de la Royal Navy. Pourquoi en parler aujourd’hui ? Pour la date, bien sûr. Mais pas seulement.
Il y a d’abord la raison de la présence britannique dans ce coin de l’océan : si le grand bâtiment allemand s’est retrouvé face aux canons de Sa Majesté, c’est que ces derniers protégeaient un important convoi de 19 cargos chargés de nourriture et d’équipements en route vers Mourmansk. A l’époque, la Russie (soviétique), qui faisait partie des Alliés, recevait de l’aide massive venant de l’ouest. « L’Histoire ne se répète pas, elle bégaie » aurait dit Marx. Vu l’actualité, je ne peux dire si c’était Karl ou Groucho.
Il y a ensuite, et surtout, le bilan de ce combat. Sur les 1 968 hommes d’équipage du Scharnhorst, seuls 36 survivants seront repêchés dans les eaux glacées de l’Arctique. A bord des bâtiments britanniques, la victoire ne fut saluée par aucune célébration. Les marins anglais n’avaient que trop conscience du sort terrible de ces hommes, et de leur chance d’avoir échappé à un même destin. C’était la guerre, mais tous avaient navigué dans les mêmes eaux si difficiles, dangereuses, violentes même, où la survie d’un naufragé devant nager se comptait en minutes. Le respect existait même entre ennemis. Entre marins. Même s’ils avaient tous compris depuis longtemps que la mer n’était pas, et de loin, ce dont il fallait le plus se méfier.
Christophe Agnus
Photo Imperial War Museums
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