Sagesse du poulpe

Pour la première fois depuis 16 ans et le début de la « photo de mer (pour bien commencer la semaine) », je vais vous parler d’un documentaire Netflix… 
Vous avez peut-être déjà entendu son titre: « La sagesse de la pieuvre ». Le titre anglais est plus précis: « My octopus teacher »
Avant de vous parler du documentaire lui-même, deux remarques pour préciser des points de vocabulaire. 
1. La pieuvre est un animal qui n’existe pas. Il y a des poulpes (octopus en anglais), des calamars, des seiches, mais point de pieuvres. Pourtant, le mot est entré dans le vocabulaire de beaucoup de Français. La faute à… Victor Hugo. C’est lui qui invente le mot dans « Les travailleurs de la mer » pour décrire un monstre marin inspiré du poulpe qui va affronter un pêcheur dans un combat épique. 
« La pieuvre n’a pas de masse musculaire, pas de cri menaçant, pas de cuirasse, pas de corne, pas de dard, pas de pince, pas de queue prenante ou contondante, pas d’ailerons tranchants, pas d’ailerons onglés, pas d’épines, pas d’épée, pas de décharge électrique, pas de virus, pas de venin, pas de griffes, pas de bec, pas de dents. La pieuvre est de toutes les bêtes la plus formidablement armée.

Qu’est-ce donc que la pieuvre ? C’est la ventouse. (…)

Une forme grisâtre oscille dans l’eau ; c’est gros comme le bras et long d’une demi-aune (1) environ ; c’est un chiffon ; cette forme ressemble à un parapluie fermé qui n’aurait pas de manche. Cette loque avance vers vous peu à peu. Soudain, elle s’ouvre, huit rayons s’écartent brusquement autour d’une face qui a deux yeux ; ces rayons vivent ; il y a du flamboiement dans leur ondoiement ; c’est une sorte de roue ; déployée, elle a quatre ou cinq pieds de diamètre. Épanouissement effroyable. Cela se jette sur vous.(…)

Cette bête s’applique sur sa proie, la recouvre, et la noue de ses longues bandes. En dessous elle est jaunâtre, en dessus elle est terreuse ; rien ne saurait rendre cette inexplicable nuance poussière ; on dirait une bête faite de cendre qui habite l’eau. Elle est arachnéide par la forme et caméléon par la coloration. Irritée, elle devient violette. Chose épouvantable, c’est mou.

Ses nœuds garrottent ; son contact paralyse.

Elle a un aspect de scorbut et de gangrène ; c’est de la maladie arrangée en monstruosité. »
Modérons tout de suite: les poulpes sont des animaux très intelligents et ne s’attaquent pas à l’homme. Mais Hugo avait besoin d’un monstre, pas d’un animal réel. Il écrivait un roman, pas une fiche biologique. « My octopus teacher », en revanche, est un documentaire. On aurait aimé que la traduction française n’utilise pas le nom d’un animal imaginaire…
2. Pour ceux qui regarderons le documentaire, ils verront le poulpe attaquer un « homard ». Les traducteurs se sont encore trompés: les images sont claires: ce homard est une langouste…

Ceci dit, pour ceux qui ont Netflix, précipitez-vous sur ce passionnant et envoûtant documentaire. 1h28 incroyable. Une plongée dans un autre monde. « My octopus teacher » est nommé aux Oscars dans la catégorie « Documentaire ». C’est mérité. On sort de ce visionnage à la fois ému, bouleversé et enthousiaste. Bravo aux auteurs, Pippa Ehrlich et James Reed, mais surtout à Craig Foster, le Sud-Africain du Cap qui a réussi à devenir ami avec un poulpe. Sur la photo, c’est lui qui nage (sans combinaison et en apnée) avec son ami céphalopodes, dans de l’eau à 9° C…

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