Et si c’était en mer qu’il fallait chercher la solution aux maux de notre monde ? Cette mer qui, à en croire Euripide, « lave toutes les souillures des hommes », qui nous apprend l’importance du temps qui passe et l’humilité. Au milieu de l’océan, on peut bien sûr filer le plus vite possible à la poursuite de la gloire, mais même les coureurs savent que la vitesse ne s’acquiert qu’au prix de travail et de patience. Il ne suffit pas d’un claquement de doigts, de quelques clics sur l’application d’un téléphone portable. Les vagues, le vent, la houle, n’ont que faire de nos technologies modernes, mais tout à voir avec une certaine sagesse antique. La sobriété imposée par la vie sur l’eau enseigne l’épicurisme (« Rien ne peut suffire à celui qui considère comme étant peu de chose ce qui est suffisant »), les caprices de la météo se vivent mieux en pensant comme le stoïcien Marc Aurèle (« Mon Dieu, donne-moi le courage de changer les choses que je peux changer, la sérénité d’accepter celles que je ne peux pas changer, et la sagesse de distinguer entre les deux »). Alors c’est avec bonheur que je vois apparaître des voiliers pour assurer le transport du public vers les îles. Comme sur la photo, entre Quiberon et Belle-Île, où la navette à voile croise celle à moteur. Demain, ce seront les autres îles du Ponant, l’île d’Yeu ou la Martinique. On redécouvrira le temps du voyage, l’importance de « faire le trajet ». On se désintoxiquera du besoin d’aller toujours plus vite comme si la géographie n’avait pas de sens. On pourra dire, comme le poète chilien Pablo Neruda évoquant le bonheur de l’attente d’un navire:
Nul ne sait d’où il vient,
Ni à quelle heure on le verra :
Mais tout est prêt
Christophe Agnus
Photo Iliens, la navette qui met les voiles