Ce n’est pas un hasard si cette photo a été prise par un chercheur de l’Ifremer à Teahupoo (Tahiti). La formation d’une vague est un phénomène scientifiquement analysé et que l’on peut mettre en équation. Ce qui est impossible à modéliser en revanche, c’est la passion liée au surf. L’explorateur anglais James Cook, premier européen à Hawaï, l’avait déjà remarqué en 1778 quand il écrivait, après avoir vu un surfeur qu’il « ne pouvait s’empêcher de conclure que cet homme éprouvait le plus suprême des plaisirs alors qu’il était conduit si rapidement et si doucement par la mer ». Car on parle ici de bien plus qu’un sport : une tradition, une culture, voire une façon de voir la vie et le monde. Avec une forme de modestie obligatoire : si vous ne montrez pas de respect pour la vague, l’océan vous apprend vite à en avoir. Mais si vous savez où est votre place et apprenez la mer, la houle, la récompense dépasse le simple plaisir de la glisse. Et c’est Jack London qui l’écrit : « Là où il n’y avait auparavant que la grande désolation et le rugissement invincible, se trouve maintenant un homme, droit, de pleine stature, ne luttant pas frénétiquement dans ce mouvement sauvage, non pas enterré et écrasé et secoué par ces puissants monstres, mais se tenant au-dessus de tous, calme et superbe, posé sur le sommet vertigineux, les pieds enfouis dans l’écume tourbillonnante, la fumée saline qui monte jusqu’aux genoux, et tout le reste de lui à l’air libre et au soleil clignotant, et il vole dans les airs, il avance, il vole vite comme la vague sur laquelle il se tient. C’est un Mercure – un Mercure brun. Ses talons sont ailés, et en eux se trouve la rapidité de la mer ».
Christophe Agnus
Photo Olivier Dugornay (2022)/ Ifremer