La pluie en mer

De grosses gouttes, lourdes, frappent la surface des flots en la creusant pour faire de la place. Image fascinante de l’eau accueillant l’eau. Le salé acceptant sa dilution. Mais la pluie, en mer, a de multiples significations. Pour le régatier, elle est souvent celle qui apporte la note discordante, rendant la manœuvre désagréable, augmentant l’inconfort du rappel. Le navigateur au long cours, lui, y voit une occasion de tout nettoyer, parfois même de se doucher à l’eau douce quand le naufragé bénit ce ciel qui lui donne de quoi survivre. Tombant dru à la verticale, elle écrase le sommet du clapot, offrant une surface plus lisse à l’étrave du navire qui peut se glisser sur un océan bruyant de ces petites frappes de tambour. Quand le vent trop fort l’accompagne, elle agresse ce qui s‘interpose, volant presque à l’horizontale avant de rebondir sur l’écume. Jamais elle ne laisse le vrai marin indifférent. Car la pluie et la mer ne sont qu’une même famille se séparant le temps d’une évaporation et d’un nuage pour mieux se retrouver après l’orage. Naviguer, c’est flotter sur de la vieille pluie qui attend d’être rajeunie par la première venue, en veille attentive dans les cumulonimbus. Le ciré ou la veste étanche, éléments essentiels du sac de marin, ne sont pas seulement pour les projections salées : autant être prêt à la recevoir pour ne pas la subir. Voire même l’apprécier, en faire un élément de notre vie sociale maritime, comme le grand Bernard Moitessier qui écrivait :  “J’écoute la mer, j’écoute le vent, j’écoute les voiles qui parlent avec la pluie et les étoiles dans les bruits de la mer et je n’ai pas sommeil.”

Christophe Agnus

Photo Photo Nata Mostova


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Bandits miséreux de haute-mer

Au début du 18e siècle, le nom d’Olivier Levasseur, un ancien corsaire calaisien tourné forban et surnommé La Buse, terrorisait les marins de commerce dans l’océan Indien, dissimulant un prodigieux trésor avant d’être pendu haut et court à La Réunion. S’ils étaient, à l’époque, plusieurs milliers à écumer les mers, il est difficile de les compter aujourd’hui. Car l’actualité nous rappelle régulièrement que, même si l’or et les pierres précieuses ne sont plus transportés par voie maritime, les flibustiers n’ont pas disparu. Mais ceux qui attaquent parfois les navires marchands dans le détroit de Malacca, le long des côtes somaliennes ou dans le golfe de Guinée ressemblent rarement à Johnny Depp dans «Pirates des Caraïbes». Aucun glamour chez ces bandits en short et tee-shirts déchirés, souvent d’anciens pêcheurs poussés au désespoir par la disparition du poisson ou la pollution des côtes, qui voient des richesses passer devant eux, et veulent y prendre leur part. Ils n’ont parfois pas le choix, enrôlés de force par de véritables truands qui savent, eux, revendre des cargaisons volées ou comment négocier avec une assurance et un armateur. Levasseur, reconverti en pilote d’un port de Madagascar, fut reconnu et arrêté en 1729 par le capitaine d’un vaisseau de la compagnie des Indes. Aujourd’hui, ce sont les marines militaires qui veillent de plus en plus. Sur la photo, ce boutre est arrêté par un navire de l’US Navy au large de la Malaisie. Fin mars 2023, le patrouilleur de haute mer Premier L’Her de la Marine nationale se portait lui au secours d’un tanker dans le golfe de Guinée. Une vigilance qui durera aussi longtemps que la misère des populations côtières. 

Christophe Agnus

Photo U.S. Navy photo /Michael Sandberg


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Philosophie appliquée

Parfois, mieux vaut ne pas penser. Ou plutôt ne pas y penser. Le danger. La peur. Le risque. Quand la mer se tache de blanc et commence à vous cacher l’horizon. Quand son bruit vous oblige à crier. Quand le vent vous fouette les oreilles et que le bateau ne sait plus comment se tenir. L’important alors est de se concentrer sur ce qui doit être fait. Une tâche à la fois. Méthodiquement. Ne rien oublier. Conserver le cap et, dès que possible, se mettre à l’abri. Sur la photo, les marins de Biotherm, dans engagés dans la course Ocean Race, en route pour un tour du monde (même avec escales) n’ont pas ce luxe de la vision réconfortante du port. Quand la tempête les touche, ils savent qu’ils n’ont pas d’autre choix que d’affronter un adversaire qui se fiche totalement de leur existence. Peut-on d’ailleurs parler de combat pour ce moment qui défit plus l’esprit que le corps ? Bien sûr, la dimension physique est forte, il faut encaisser les coups des éléments, le froid, l’eau, la violence des mouvements du bateau, mais le plus difficile est mental ; accepter de livrer une bataille dont on ne sort jamais vainqueur (on ne bat pas la mer…), juste heureux d’avoir su gérer la puissance sauvage de la nature et, parfois, d’en être sorti plus vivant que jamais. On ne tient pas longtemps en mer sans une certaine capacité à philosopher. L’océan est plus qu’un élément naturel : une leçon de vie. Pour apprendre peut-être, aussi, à penser ce que nous proposent certains aspects de la vie à terre : « Tout ce qui a été dit des rois peut se dire des flots, écrivait Victor Hugo. On est leur peuple ; on est leur proie. Tout ce qu’ils délirent, on le subit ». En mer, au moins, on peut se mettre en fuite…

Christophe Agnus

Photo Ronan Gladu / Biotherm / The Ocean Race


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L’île de tous les noms

C’est un 3 avril, il y a 312 ans (en 1711 donc), que Mathieu Martin de Chassiron et Michel Dubocage, les commandants des frégates La Princesse et La Découverte, ont débarqué au milieu de ces fous masqués, la plus importante colonie du monde avec quelques 100 000 oiseaux adultes. Je ne suis pas certain qu’à l’époque ils savaient l’importance de leur geste. Ce n’était, après tout, qu’un simple atoll désertique et minuscule (1,7 km2), perdu dans le Pacifique à 1000 kilomètres du continent américain. La légende dit que Magellan l’aurait découvert le premier, dès 1521, et qu’un Espagnol y serait aussi passé en 1528, alors qu’il faisait route vers les Philippines. Le pirate Clipperton y aurait même enterré un trésor en 1704. Mais aucun d’entre eux n’a vu d’intérêt à signaler son passage. Les deux marins français sont les premiers à la cartographier et, y étant arrivé un vendredi saint, à la baptiser « île de la Passion ». Le premier d’une série de noms : « L’île au trésor », « L’île au guano », « L’île aux crabes », « L’île aux oiseaux », « L’iles aux fous » et « L’île tragique » après qu’une colonie mexicaine s’y installe pour s’y perdre (onze familles au départ, 3 femmes et huit enfants à la fin…), et finalement l’île de Clipperton. Aujourd’hui, les scientifiques français en font régulièrement une base de recherche et la Marine s’y arrête aussi pour confirmer l’appartenance à la nation. L’intérêt stratégique n’est pas sur l’atoll, mais autour. Dans les 435 612 km2 de mer l’entourant qui, par les lois internationales, sont une zone économique exclusive française, la seule du Pacifique nord, et la cinquième plus vaste de l’Outre-mer national. Le vrai trésor de Clipperton n’est pas enterré : il est en mer.

Christophe Agnus

Photo © IRD – Loïc Charpy


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